Je suis née de celles

Je suis née de celles qui mettent des garçons au monde. Et des hommes, des vrais. Je sais, ça surprend. Et qu'est-ce que je suis, moi, alors ? Qu'est-ce que j'ai toujours été d'ailleurs ?
     Quand ma mère est tombée enceinte de son deuxième enfant, elle a mangé plein de yaourts, juste parce qu'on lui avait dit que ça aiderai à ce que la graine dans son ventre provienne d'un chou. Ce fût un échec : deuxième bébé, deuxième fille. Alors quand le numéro trois a montré le bout de son nez, le sexe n'avait plus d'importance : quoi que ce soit, ce sera un mec. Et me voila, moi, la numéro trois.
     Alors, comme promis, il était hors de question que l'on m'apprenne à rêver d'histoires de princesses et de longs cheveux, de robes et de sandalettes. Non, moi, je jouais au foot et je collectionnais les petites voitures. A cette époque, j'ai voulu devenir éboueur, pompier, mais surtout, surtout pas maîtresse !
     En grandissant, j'ai compris la différence. J'ai compris que je n'étais pas comme tous mes copains qui, eux, commençaient à regarder les filles différemment alors que, pour moi, elles n'étaient encore que des cloches. Ils les regardaient toutes. Toutes, sauf moi.
     A toutes les mistinguettes qui m'écoutent, j'en profite pour faire passer le message : pour plaire aux mecs, il faut : avoir les cheveux longs, porter des vêtements pas trop larges, rester discrète, pas trop vulgaire, et surtout, surtout être féminine. Pour les autres, il va falloir être patientes.
     Malgré tout, j'avais un atout considérable, une longueur d'avance : leur confiance. J'étais leur pote, leur confidente. "Ouais, tu la trouves comment la fille là-bas ?", "Bah... comme les autres, quoi... c'est une fille...".
     Et non ! A croire qu'ils ne le voient pas, les mecs, que je pourrais en être une moi aussi ! Mais est-ce un crime de ne pas vouloir perdre son temps à se peinturer la gueule tous les matins ? De garder les cheveux courts pour ne plus avoir à croiser l'ombre d'un peigne sur son chemin ? De ne pas aimer le shopping ? De pisser debout ? Et à toutes celles qui diront que c'est pas possible, je leur promets le contraire !
     Alors oui, je suis née de celle qui voulait mettre un garçon au monde. Et finalement, où est le mal ? Peut-être que moi aussi, un jour, j'en aurai un.



05/09/2009
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